Une équipe
presqu’entièrement au féminin et dont l’âge moyen est sous les trente ans pour
un chiffre d'affaires dépassant les 230 millions d'euros. «Pour une
entreprise comme la nôtre basée sur la mode, la pandémie a été la tempête
parfaite. Mais les périodes de crise, même si elles sont difficiles à
affronter, nous permettent de prendre des décisions courageuses et en des temps
plus rapides». Pour FARE Insieme, Giampaolo Colletti interviewe Alessandro
Varisco, administrateur délégué de Twinset
di Giampaolo Colletti
@gpcolletti
Sur un des murs du bureau d’Alessandro
Varisco, administrateur délégué du colosse de la mode féminine Twinset depuis
2015 et implanté en Émilie, on trouve un panier de basket. On y trouve aussi un
ballon en cuir qui de temps en temps prend son envol, visant justement le
diamètre ouvert de ce panier de basket. Au fond, pour raconter cette marque, on
peut partir de ce panier et d’un match qui aujourd'hui se joue sur les marchés
mondiaux et en particulier sur ceux numériques et interconnectés, et dont le
résultat est tout sauf prévu. Parce que tout vient du jeu d'équipe, des
intuitions géniales et surtout, de beaucoup d’entraînement. L’entreprise naît
au cours des années 80 et aujourd'hui l’équipe est composée de
850 personnes dont 92 % sont des femmes dont l'âge moyen est
compris entre 28 et 30 ans. Une centaine travaille en Russie, en Belgique,
en France, en Espagne et dans les commerces au détail. Et la majeure partie des
cadres est toute au féminin, avec sept femmes sur onze. Le chiffre d'affaires
se trouve autour de 235 millions d’euros, mais la marque de prêt-à-porter
féminin est une activité toujours plus complexe, freinée nécessairement l’année
dernière par le virus, entre confinement et restrictions, et aujourd'hui repartie.
D'ailleurs l’urgence sanitaire de la pandémie,
devenue crise économique et systémique pour ce qui s’est transformé en syndémie, a touché plus particulièrement
le secteur de la mode, en obligeant la redéfinition des processus, des langages
et des relations avec les clients. Même dans ce cas, le ballon peut marquer un
panier. C’est juste une question des stratégies, de vision, de folie lucide.
«J’ai joué au basket pendant trente-deux ans, je vis et je travaille dans
une zone géographique où ce sport est un culte. J’ai deux enfants qui par choix
jouent également au basket. C’est un sport reposant, prenant, parce qu’il
scelle les relations ; il est également chargé en adrénaline. Vous avez
vingt-quatre secondes pour tirer et jusqu’à la dernière seconde, personne ne
sait qui a gagné et quel sera le résultat final. Vous pouvez avoir dix points
de retard et renverser la situation. Je suis habitué à jouer en attaque et je
joue à fond», raconte Varisco. Sans aucune métaphore, dans cette
incertitude se reflète l’incertitude de notre époque. «Pour une
entreprise comme la nôtre basée sur la mode, la pandémie a été la tempête
parfaite, parce que les occasions d'utilisation ont été suspendues. Mais les
périodes de crise, même si difficiles à affronter, nous permettent souvent de
prendre des décisions courageuses et en des temps assurément plus rapides. Je
trouve que la pandémie nous a pris totalement au dépourvu, mais nous nous
sommes engagés pour survivre à ce grand chamboulement, tout en y donnant une
attention spécifique. Comme je le dis souvent à mes collaborateurs : nous
réagissons à cette émergence comme à une nouvelle opportunité», précise
Varisco, qui raconte depuis Carpi cette entreprise, dans une structure
futuriste avec un siège social et une usine, alors que les salles d’exposition
sont distribuées un peu partout en Italie.
L’esprit
gentil. «Nous sommes nés comme fabrique de
tricots, en misant sur la laine, sur les couleurs et sur la chaleur. J’ai
trouvé ici une entreprise accueillante, qui s'adresse à ces femmes romantiques,
douces, déterminées. Cette entreprise naît de deux fondateurs éclairés;
l’environnement est familial et la caractéristique qui nous caractérise est la
gentillesse, entre nous et avec nos clients. Pour moi, la gentillesse signifie
avoir soin de soi-même pour prendre soin des autres. La gentillesse signifie
non seulement affaires pour affaires: derrière chaque numéro ou personne,
il y a tout un monde à découvrir. C’est la gentillesse qui unit fortement les
équipes, parce qu’elle implique écoute et respect. C’est comme si un fil de
laine invisible unissait chacun d’entre nous», explique Varisco. La
gentillesse se trouve également dans le fait d’intercepter le client final,
l’écouter, le chouchouter. «Nous avons qu'il est devenu plus
consciencieux; il est donc fondamental de comprendre aujourd'hui ce qu'il
en sera de son identité de demain. Après avoir rouvert les magasins après les
fermetures de la première et de la deuxième vague de la pandémie, la
fréquentation était de 40 % en moins par rapport à l'époque d'avant la
Covid. Pour nous stimuler de manière provocatrice, j'ai dit: «Si
nos clients ne viennent pas à nous, nous irons à eux». C’est un concept
qui va au-delà du slogan parce qu’ayant un CRM évolué, il est beaucoup plus
facile de comprendre le comportement d'achat des consommateurs, de les tracer »,
explique Varisco. C’est ainsi qu’est née la boîte gentille, qui contient huit
articles et une lettre d'accompagnement. Le message est clair: nous ne
voulons pas que vous achetiez ces objets, mais nous voulons que vous les
voyiez. Une opération au succès retentissant: en moyenne, l’entreprise a
vendu plus de la moitié des articles envoyés et a également reçu des lettres de
remerciement.
Vision
globale. On repense la relation avec la
clientèle, en valorisant le territoire, l’histoire, le parcours qui a été fait.
«En comparaison à nos débuts, nous avons maintenu notre ADN et les
facteurs critiques du succès. Nous avons ainsi produit de beaux survêtements accueillants
pour maintenir l'atmosphère romantique, mais également pour expliquer le
nouveau contexte casanier forcé. Nous avons en effet projeté notre vision dans
un contexte contemporain plus grand. La numérisation a rendu le client plus
conscient, mais a également produit un nivellement des propositions.
Aujourd’hui, on remarque un nivellement de contamination des différentes
marques qui entraîne une homologation. Voilà pourquoi nous avons épuré notre
collection, en adoptant un langage plus international. Nous avons misé sur
l'arrivée d’un nouveau directeur créatif anglais pour conquérir les
marchés; en conservant nos codes, nous avons apporté un caractère plus
international et une approche universelle dans un monde global», raconte
Varisco. La recette gagnante c’est de rester locaux tout en
s'internationalisant. «D'ailleurs, notre district a toujours été un de
plus grand de la mode. C’est pourquoi nous avons continué à investir sur le
territoire : aujourd'hui, nous avons soixante machines high-tech pour les
tissus. On y trouve également une école de tricots à l’avant-garde, il y a la
culture: nous avons besoin de plus d'attention aux compétences et
d'éduquer et de passionner les jeunes à ces métiers». Être pionniers,
arriver avant les autres, mais en se faisant comprendre des clients :
c’est ainsi qu’est née l’opération de location, qui répond à une demande de
personnalisation du marché. «Nous avons réalisé un groupe d'écoute avec
des jeunes entre 25 et 30 ans. Et nous avons rencontré deux effets très
beaux: en travaillant avec les jeunes, l’expérience est un
enrichissement; puis nous avons compris l’importance de l'utilisation et
non de la possession. Cela nous permet de procéder à un travail presque de
haute couture. D'ailleurs, le client s'attend à quelque chose d'unique».
Il
y a toujours un plan B. Se
mettre à l'écoute, mais surtout se remettre en question. «Aujourd'hui, la
pandémie a créé un changement radical qui doit être compris par les
entreprises. Ce n’est pas dit que ce que nous avons fait jusqu’à maintenant
vaut également demain parce que l’évolution des consommateurs est soudaine.
Aujourd'hui, nous avons un surplus d'offres, mais les préférences des
consommateurs se confrontent à
l’écologie. C’est ça notre plan B, c’est-à-dire comprendre notre impact par
rapport à l’environnement. Il existe ensuite une écologie sociale, c’est-à-dire
de se donner un objectif pour s'améliorer petit à petit, jusqu'à arriver
ensemble à notre but», précise Varisco. C’est dans l'équipe que l’on
trouve la voie. D'ailleurs, pour ce cadre supérieur, le meilleur n’est pas ce
qui a toujours été fait, mais le fait de changer et d'innover. Se remettre en
cause et se passionner, venir au travail avec le sourire sur les lèvres et avec
le soleil en poche. Et voilà que revient la métaphore du match de basket, dans
laquelle on gagne ensemble. «Il s'agit d’une règle d’or de ce sport, et
de bien d'autres. Les talents seuls ne servent à rien s'ils n’ont pas d’équipe
qui leur permet de marquer des paniers».
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